Plan chômage de longue durée : un accueil en demi-teinte du collectif Alerte et des partenaires sociaux

Plan chômage de longue durée : un accueil en demi-teinte du collectif Alerte et des partenaires sociaux

S’ils saluent certaines mesures inscrites dans le plan “Prévenir, aider, accompagner : nouvelles solutions face au chômage de longue durée”, présenté par le ministre du Travail, le 9 février 2015, les partenaires sociaux en appellent à une mobilisation des entreprises et demandent des politiques économiques plus ambitieuses pour relancer l’emploi. Le collectif associatif Alerte estime, pour sa part, que “faute de volonté des partenaires sociaux, le plan ne répond finalement pas à ce jour à [l’] enjeu” d’une mobilisation conjointe des entreprises, des associations et des partenaires sociaux. Les associations de lutte contre l’exclusion demandent ainsi de nouveau “un réel engagement des partenaires sociaux”, via notamment la négociation d’un accord national interprofessionnel sur le chômage de longue durée.

Le collectif Alerte (1) “salue la prise en compte de la nécessité de lever les freins sociaux à l’emploi” dans le plan de lutte contre le chômage de longue durée, présenté par François Rebsamen, ministre du Travail, de l’Emploi, de la Formation professionnelle et du Dialogue social, le 9 février. Une approche globale des freins à la reprise d’emploi qu’apprécient également la plupart des partenaires sociaux.

Un nouveau plan succédant à des échecs

Le “plan Rebsamen” n’est pas le premier en direction des demandeurs d’emploi de longue durée. Au printemps 2010, sous l’égide de Laurent Wauquiez, à l’époque secrétaire d’État chargé de l’Emploi, est conclu, avec les partenaires sociaux, le “plan rebond”. Outre le financement de contrats aidés et de formations rémunérées, ce plan prévoit une “aide exceptionnelle de retour à l’emploi” de 460 euros mensuels dans la limite de six mois pour les chômeurs en fin de droits. Le “plan rebond” a largement échoué, étant loin de toucher les cibles. À l’occasion du “sommet sur la crise” en janvier 2012, Nicolas Sarkozy alors président de la République annonce un nouveau plan en direction des chômeurs de très longue durée : ceux-ci devaient être convoqués par Pôle emploi pour un entretien approfondi et devaient se voir proposer des “solutions de reclassement”, mobilisant notamment formations, contrats aidés et prestations d’accompagnement vers le retour à l’emploi. Dans une étude de décembre 2014, Pôle emploi considère que “le ‘Plan DETLD’ n’a très probablement produit aucun résultat significatif en termes de sorties du chômage”.

Pour rappel, le plan “Prévenir, aider, accompagner : nouvelles solutions face au chômage de longue durée” s’articule autour de trois axes : “retrouver le chemin de l’emploi”, “aider à surmonter les obstacles de la vie” et “accompagner et encourager les employeurs qui s’engagent”, reprenant, globalement, des dispositions déjà existantes ou annoncées.

LES PARTENAIRES SOCIAUX DEMANDENT PLUS

Pour la CFDT, le plan comporte des mesures intéressantes, mais elle appelle désormais à leur mise en œuvre. “Ce qui a été présenté est une première étape”, note de son côté Éric Aubin de la CGT, “il faut ensuite passer à une autre étape avec des moyens, car là, l’État ne met pas un sou sur la table”. Un point de vue partagé par Force ouvrière qui note que “nombre des mesures annoncées par le gouvernement sont financées par d’autres que lui : les demandeurs d’emploi, le FPSPP (Fonds paritaire de sécurisation des parcours professionnels), Action logement ou encore les CAF (caisses d’allocations familiales)”. Le SNU-Pôle emploi s’interroge sur la capacité de l’opérateur public à “mettre en œuvre ces mesures de façon efficace et personnalisée” “à iso-moyen” et demande au ministre du Travail d’ouvrir “le dialogue pour négocier les moyens nécessaires dont a besoin Pôle emploi pour faire face à ses missions”.

Si FO souligne que “la question du chômage de longue durée comme du chômage plus globalement, [relève] d’abord et avant tout de politiques macro-économiques”, la CFTC ajoute que “des politiques de prévention devront être menées en parallèle sur le front de l’emploi”. Quant à la CFE-CGC, elle remarque que la “mobilisation pour l’emploi déclarée par le ministre du Travail […] ne sera complète et efficace qu’à partir du moment où elle deviendra la priorité des entreprises”, estimant que ces dernières sont encore “très loin d’une mobilisation responsable”. La CFE-CGC ajoute que “s’il n’y a pas de création d’emplois toutes ces mesures […] n’auront pour effet que de changer l’ordre de la file d’attente des demandeurs d’emploi”.

Pour la CFDT, les mesures sont insuffisantes, car elles ne concernent qu’une partie des demandeurs d’emploi de longue durée. La CFTC insistant quant à elle sur le fait que “ces efforts ne doivent pas se faire au détriment de l’effort porté à l’ensemble des demandeurs d’emploi”.

ALERTE DEMANDE UNE MOBILISATION ACCRUE DES PARTENAIRES SOCIAUX

2,2 millions

Au total, en métropole, le nombre de chômeurs de longue durée inscrits en catégories À, B et C, depuis plus d’un an à Pôle emploi a augmenté de presque 200 000 individus sur un an pour s’établir à 2,2 millions fin décembre 2014. Fin décembre 2014, la France métropolitaine comptait 5,2 millions de chômeurs inscrits en catégories A, B et C (lire sur AEF).

“Seule la mobilisation des entreprises, aux côtés des associations d’insertion par l’activité économique notamment, et du handicap, permettrait de trouver des solutions”, estime le collectif Alerte, regrettant que “faute de volonté des partenaires sociaux, le plan ne répond finalement pas à ce jour à cet enjeu et risque de s’en trouver freiné”. Le collectif demande ainsi, une nouvelle fois, “l’engagement des entreprises et des syndicats dans un accord national interprofessionnel”. Rejoint en cela par la CGT qui rappelle qu’elle “demande une négociation sur le sujet [du chômage de longue durée] depuis longtemps”.

Alerte attend en outre des entreprises qu’elles s’impliquent dans la mise en œuvre des mesures regroupées dans le plan, comme les PMSMP (périodes de mise en situation en milieu professionnel) ou le contrat de professionnalisation “nouvelle chance”. Il ajoute également que “la lutte contre le chômage de longue durée doit être beaucoup plus large” et “mobiliser l’ensemble des acteurs, notamment les collectivités locales”.

Par Morgane Gaillard  –  Dépêche AEF

(1) 38 fédérations et associations nationales de lutte contre la pauvreté et l’exclusion membres de la Commission lutte contre la pauvreté de l’Uniopss et 30 collectifs inter-associatifs locaux présents dans 14 régions.

Auteur: SNU

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